TikTok, vitrine d’un génie créatif né de la débrouille étudiante
LinkedIn n’est plus l’unique terrain de recherche des étudiant.e.s en recherche d’alternance : qu’ils soient en communication, design ou encore en audiovisuel, les étudiant.es se dépassent pour se démarquer et espérer attirer l’attention d’une entreprise.
Même s’ils continuent d’y soigner leur profil, leur photo professionnelle et titrent leur post à coup d’accroche percutante, ils savent aussi que, dans un marché saturé, la visibilité ne se gagne plus seulement à coup de connexions et de recommandations. Une autre scène s’impose donc à eux : Tik Tok
Nous étions déjà bien loin du porte-à-porte depuis l’apparition de la digitalisation, mais la Gen Z réinvente la façon de chercher du travail avec des nouveaux codes de candidatures. Les CV ne lisent plus, ils sont racontés sur des vidéos 15 secondes minimum, parfois sous forme de mini-film et l’on découvre le/la candidate à travers un profil construit grâce à un montage et de la musique.
Mais derrière cet élan créatif, une réalité plus complexe se dessine : celle d’étudiants autant talentueux et motivés qu’épuisés devant compenser le manque d’opportunités et de ressources par une inventivité hors du commun. C’est une génération hyper-créative, mais souvent contrainte de devoir faire beaucoup avec peu.
Nous étions déjà bien loin du porte-à-porte depuis l’apparition de la digitalisation, mais la Gen Z réinvente la façon de chercher du travail avec des nouveaux codes de candidatures. Les CV ne lisent plus, ils sont racontés sur des vidéos 15 secondes minimum, parfois sous forme de mini-film et l’on découvre le/la candidate à travers un profil construit grâce à un montage et de la musique.
Mais derrière cet élan créatif, une réalité plus complexe se dessine : celle d’étudiants autant talentueux et motivés qu’épuisés devant compenser le manque d’opportunités et de ressources par une inventivité hors du commun. C’est une génération hyper-créative, mais souvent contrainte de devoir faire beaucoup avec peu.
L’Essor du « personal branding » sur TikTok
Cette façon de se vendre sur Tik Tok n’a rien de nouveau : il fait simplement partie du processus de consommation digital Aujourd’hui pour créer du trafic, de la vente entre autres, beaucoup ont recours au « personal branding » ou tout simplement « l’art de se raconter avec intention » pour montrer ce que l’on dégage, ce que l’on sait faire et ce qu’on incarne. Sur TikTok, le concept est moins formaté et strict que sur LinkedIn. D’après une étude en 2024 de Blakis Khalili et Norsimaa Mustaffa, la plateforme est devenue un vrai terrain de jeu pour construire sa marque personnelle. Là où LinkedIn va simplement présente un parcours, Tik Tok raconte un univers, une façon de penser et met en avant de façon concrète la créativité. Selon une étude de réalisé par Arianto et al, Tik Tok pousse justement les jeunes à trouver ce juste milieu entre authenticité et stratégie : faire preuve de sincérité sans être top brutal, créatif sans que ça ait l’air calculé parce que tout se joue sur le détail de lumière, de ton, de montage… La forme compte autant que le fond. Certain.e.s créateur.ices de contenu sont de parfaits exemples de l’utilisation du personnal branding comme Anyme023 présent sur Tik Tok et sur Twitch où il partage son quotidien sans filtre de façon drôle et sincère. Son ton naturel, son humour spontané et sa cohérence visuelle font partie intégrante de son identité. De la même manière, Hamedax, connu pour son humour absurde et ses vidéos à l’énergie reconnaissable ou Lola Dorn qui joue sur une esthétique visuelle élégante et cohérente, montrent comment un style personnel peut devenir une véritable marque. Le personnal branding ne se limite au business ou à la communication : il s’agit surtout d’être identifiable, singulier et sincère.
Créativité éclatante, moyens limités
Les points importants derrière ses vidéos sont le fait qu’elles sont la plupart du temps produites avec peu ou pas de budget mais surtout sans certitudes d’avoir un retour positif ou non. Les contenus sont montés sur des applis gratuites parfois tournée dans une simple chambre et ce sont des étudiant.e.s qui jonglent entre les cours, les stages et les petits boulots. Il est important de noter que selon un rapport de l’INJEP, près d’un étudiant sur deux vit sous le seuil de la pauvreté et beaucoup doivent choisir entre, se loger, se nourrir et étudier. Et pourtant, ce sont ces mêmes jeunes qui produisent les formats les plus innovants du web ? C’est là tout le paradoxe : plus précaire que jamais mais aussi plus inventive. Ce que certains appellent de la débrouille eux, appellent ça de l’adaptation. Choisir de poster ce genre de contenu sur Tik Tok ce n’est pas qu’une question de trend, c’est aussi un moyen d’illustrer sa crédibilité. Les hashtags #laminuteetudiante ou #etudiantgalère ont mis en lumière ce paradoxe. Derrière les vidéos humoristiques, on y découvre la réalité de jeunes qui composent avec peu : matériel vieillissant, journées à rallonge, fatigue accumulée. Mais ce qui frappe, c’est la manière dont ces contraintes deviennent matière créative. Créer un CV vidéo avec son téléphone fissuré, détourner un son viral pour parler de sa recherche de stage, imaginer une campagne à la façon d’un pub Nike, c’est tout un art. C’est même une forme de résistance douce, où la créativité devient un moyen de reprendre le contrôle sur une réalité économique instable. Comme le dit la chercheuse Wenda Asmita, cette génération « met en scène sa propre vulnérabilité pour en faire une force narrative. » Ce phénomène traduit un changement significatif : le CV classique ne suffit plus. Les recruteurs doivent eux-mêmes s’adapter à ces nouveaux codes notamment dans les secteurs du marketing, de la communication et du design. Certaines agences demandent désormais à leurs candidats d’envoyer un Tik Tok de présentation à la place de la traditionnelle lettre de motivation.
Face à cette réalité, il est donc urgent de repenser la manière dont on évalue les jeunes talents : un.e étudiant.e capable de transformer une contrainte en concept, un manque en idée, un réseau inexistant en communauté démontre déjà de la créativité, de l’agilité et de l’autonomie.